Le château de Berlin subit particulièrement le 3 février 1945 d’importants dommages suite aux lourds bombardements sur la ville. Il brûla quatre jours sans arrêt. Cela fait déjà deux ans que les Berlinois s’étaient résignés à ne pas gaspiller l’eau pour toute alarme incendie puisque de toute façon les bombardiers remettaient ça le lendemain et annihilaient tous leurs efforts.
Cependant il était moins atteint que le château de Charlottenburg par exemple. Les murs tenaient encore debout, certes l’intérieur avait brûlé, mais il était encore réhabilitable. Son dynamitage est un choix purement arbitraire :
Les dirigeants de la RDA voulaient en terminer avec l’histoire de la Prusse pour des raisons idéologiques. Ainsi le château de Berlin, comme l’église de la garnison et le château de Postdam ont été sacrifiés malgré la possibilité d’une éventuelle reconstruction. Cela a bien été fait à Charlottenburg, à Würzburg et dans d’autres villes encore.
“Le centre de notre capitale, le Lustgarten et le site actuel du château en ruine vont devenir une grande place pour les manifestations.”
(Walter Ulbricht, Secrétaire général du SED en 1950)
“Tant que l’on ne m’empêchera pas de parler par la violence, je n’arrêterai pas de protester contre cette décision et pas comme ressortissant de l’ouest mais plutôt comme un fils de l’est qui se sent intimement lié à Berlin et à sa culture et qui s’efforce de donner un contrepoids aux questions culturelles à l’est, en ce qui concerne les héritages artistiques de qualité comme le château de Berlin”
(Pr. Dr. Richard Hamann, Doyen de la faculté d’Histoire de l’art de l’université Humboldt est-berlinoise 1950)
“Compte tenu de l’importance du château sur les plans artistique, historique, urbain et social à l’échelle européenne, compte tenu de son rôle de témoin architectural sur cinq siècles, l’académie allemande des sciences rejette l’idée d’une destruction planifiée et définitive du château. L’académie intervient dans le cadre de ses compétences et de son devoir pour participer à la protection des biens culturels du peuple allemand en général et en particulier à l’entretien des monuments. Entre autres biens importants sous sa tutelle, le château de Berlin est l’une de ses priorités.”
(Professeur Johannes Stroux, Président de l’académie des sciences de Berlin Est, 1950)
“On y reconnaît les grandes formes classiques et elles en imposent aussi comme ruines. On devrait les sauver, reconstruire. Cependant à Berlin on dynamite et on rase; le dynamitage du château de Berlin est un acte incompréhensible de volonté de destruction fanatique qui sera jugé par l’histoire comme insensé et criminel.”
(Professeur Ernst Gall, Directeur général de l’administration bavaroise et prussienne des châteaux et jardins, 1950)
La FDJ est détachée au « travail volontaire de construction ». Encouragés par les images d’O. Grotewohl, de Staline et de W. Pieck posées devant la fontaine de Neptune devant le portail II, soutenus par la musique, on construisait dans un nouveau Berlin une place de manifestations triste.
“My conscience is at peace. For the moment everyone is crying out, but once the Palace is gone, not one voice will be heard thereafter.”
(Otto Grotewohl, Communist Party, Ministerpresident of the GDR, 1950)
“The resulting formlessly spreading open space would have on it eastern edge (not even at its center) the cathedral as its only accent – that pseudotechtonic construction of misunderstood overblown pomp which has always disturbed the viewer and now, in its isolation, will be even more obtrusive. Do we really want this? Next to the towering cathedral dome, no building in the same avenue – only separated from it by the width of one street – can be erected that can somehow dominate the area. It will always be repressed by the cathedral.”
(Ernst Gall, 1950)
“We had the choice – the palace or the cathedral. If we had torn down the cathedral, then we would have provided the west with grist for the mill for years and they would have accused us of attacking the church. Therefore it was better to choose the Palace. We can deal with the art historians!”
(Wilhelm Girnus, later State Secretary for Technical and Secondary Schooling in the German Democratic Republic, 1951)
“Whoever has even a trace of feeling for architecture knows that one can never provide posterity with an idea of the gigantic breadth of such a work as this merely through the removal of isolated architectural elements.”
(Kurt Reutti, journalist, 1950)
“The people in power in east Berlin perceive the fame of the Palace as a discordant note from a long past cult of nobility. This has irritated their sensitive eardrums and must now be hushed. They prefer to hear their own noises on the demonstration square which they have built on the site of the demolished Palace. Yet this bleak square will also one day become a monument, a monument to lack of respect, to narrow mindedness, and to spiritual poverty.”
(Prof. Ragnar Josephson, Svenska Dagbladet, Stockholm, 1950)