La deuxième transformation a été exécutée par A. Stüler. La salle était devenue tellement petite que sa décoration sous le second empire apparaissait pingre. En plus, les centaines de bougies utilisées pour l’éclairage ont laissé des voiles de suie ; la poussière du chauffage accentuait encore plus la saleté. Les dames salissaient leur robes de bal, il n’y avait pas encore de nettoyage chimique à cette époque-là !
Un troisième aménagement pensé par Ernst von Ihne a permit d’agrandir la pièce jusqu’à la cour : elle mesure dorénavant 16m x 32 et a une hauteur de 14 m. Elle fut la première salle des fêtes de Berlin à être électrifiée. Le chauffage à air chaud a été filtré à partir de la cave et ainsi on pouvait faire la fête sans ruiner sa garde-robe !
La salle en ambre jaune dite Bernsteinzimmer – L’histoire vraie
Source : Günter Wermusch, Die Bersteinzimmer – Saga ; Goerd Peschken, Das Bernsteinzimmer, Schriftenreihe der Stiftung Preußische Schlösser und Gärten Berlin 2002.
Alors par élimination, on décida de l’installer dans le château de Berlin, dans une salle au second étage construite par Eosander, donnant sur la Salle blanche. La salle n’étant pas assez grande pour recevoir ce retable, certains panneaux ont été mis de côté. Plus tard, cette salle devenait le « tabacs-collegium » de Frédéric Guillaume Ier.En 1713 Frédéric Ier mourut en laissant derrière lui d’importantes dettes. Son successeur, étant plus économe, ne se permettait pas d’autant de luxe ostentatoire de son père. En 1716, il invita le tsar Pierre le Grand au château de Berlin. Celui-ci, sans gêne, réfléchit tout haut à ce qu’il pourrait ramener comme souvenir de Berlin ; il avait remarqué la chambre en ambre ! Frédéric-Guillaume Ier lui offrit des trésors ayant appartenu à son père afin de s’assurer l’acquisition de la Poméranie. Après de longues tractations, il y adjoint ce retable en ambre.
« …daß der König dem Czaar zwey kostbahre praesente gethan hat, nämlich das prächtige, schöne Jagtschiff (heutige Lesart: Luxusyacht), dan ein prätieuses Bernstein-Getäffel zu einer vollenkommenen Bekleidung und Ausschlagung eines Cabinets….Der Czaar hat mit großer Verbindlichkeit zu erkennen gegeben, daß er auf ein Gegenpräsent starck würde bedacht seyn. »
30.000 talents impériaux avait coûté la chambre en ambre jaune. Elle quitta Berlin en 1717 et voyagea en bateau, passant par Klaipéda et Riga pour atteindre Saint Petersbourg. Elle fut d’abord installée dans l’ancien palais d’hiver, puis six ans plus tard dans le nouveau palais d’hiver. En 1755, elle déménagea au palais de Catherine à Tsarskoie Selo (l’actuelle Pouchkine), résidence d’été de la famille du tsar.
Carlo Rastrelli, l’architecte du palais , eut besoin de huit années avec l’italien Martelli pour introduire ce retable dans une pièce six fois plus grande que la précédente afin de garder le charme originel de la pièce et la mise en valeur du retable !
Tous les panneaux ont été utilisés, même ceux mis de côté au château de Berlin qui ont été offerts par Frédéric le Grand au tsar. D’autres éléments ont dû être rajoutés comme 24 miroirs vénitiens et un encadré d’ambre. Ainsi par cet élargissement la substance originale de la salle en ambre jaune n’en était qu’une petite partie. Un hommage à Frédéric le Grand y a même été rajouté au XIXe s. : une miniature en argent d’après un portrait berlinois fait en remerciement et admiration au prince prussien.
En retour, le cadeau du tsar ne parvint qu’une année plus tard. Il savait que le roi Frédéric-Guillaume avait une préférence pour les soldats qui mesuraient au moins 1,90m. Surnommés « les longs gaillards » à cause de leur taille peu commune, ils appartenaient à la garde réservée du roi. Leur signe distinctif était un grand chapeau pour les allonger encore. C’est l’une des raisons qui le fit surnommer Roi-Sergent, bien qu’il n’ait pour autant conduit aucune guerre. Donc à l’été 1718, pour lui faire plaisir, le tsar lui envoya 55 « longs gaillards » avec des armes de Tula, une barque, un tourneur à bois et un trophée en ivoire fait par le tsar lui-même !
Voilà l’histoire vraie de la chambre en ambre !